"Les lectures de La Formation de l’acteur et de La Construction du Personnage de Constantin Stanislavski ont motivé l’élaboration de cette pièce. Ces ouvrages m’ont en effet menée à m’intéresser de façon plus approfondie au lien entre les états de corps et l’expression des affects, notamment à travers les notions de jeu mécanique ou de non-exhibition des émotions. Comment peut-on en effet traduire chorégraphiquement ces dernières sans tomber dans la démonstration ou le mime ?
Pour poursuivre ces réflexions, j’ai organisé un atelier d’improvisation qui cherchait à éprouver une certaine intériorité motrice chez les interprètes, au-delà de l’expressivité, à partir de laquelle expérimenter différentes possibilités d’interprétation. A mesure des échanges, aussi bien parlés que dansés, qui y ont eu lieu, des interrogations relatives à la conscience du corps dans la créativité et à l’intuition ont peu à peu émergé. Ces deux notions révélaient chez les danseurs les nécessités de s’écouter et de se comprendre, c’est-à-dire de littéralement s’entendre. J’ai alors ressenti leur volonté de s’extirper de l’exécution apparente au profit d’une incarnation davantage tournée vers l’intériorité de chacun. Ancrés dans un moment singulier, sans a priori, ni antécédents, observateurs et acteurs de leurs propres mouvements, les danseurs m’avaient donné à voir ce que pouvait être une introspection dansée.
Pour ma première pièce, j’ai choisi de m’entourer de femmes, deux interprètes pouvant s’exprimer à travers plusieurs styles de danse et qualités de mouvements.
Les échanges que j’entretiens naturellement avec elles, tant au niveau discursif que corporel, m’ont très vite convaincue de penser la dramaturgie comme une discussion chorégraphique.
J’entends ainsi organiser sur scène un dialogue dansé qui, se passant de mots, laisse place à la réalité du corps comme seul reflet du voyage introspectif.
Il reproduira les dynamiques de la conversation à plusieurs (de la synchronisation aux digressions personnelles) comme du monologue (les réflexions solitaires, les pensées intimes).
Appuyée par la scénographie, encore à imaginer, je chercherai à manifester que si l’introspection part bien d’un mouvement personnel, elle finit toujours par ouvrir sur une résonance commune."
Mellina Boubetra
Mellina Boubetra
Après cinq ans d’études en biologie, elle décide fin 2015 de faire de la danse professionnellement. Elle commence par faire des battles all style puis intègre la compagnie John Degois et Andrew Skeels Choreography. Elle crée la compagnie ETRA en 2016, avec pour volonté de réunir des personnes dont la sensibilité artistique mais aussi humaine l’inspirait. La compagnie est composée de quatre interprètes issues de milieux différents, allant du Contemporain au Hip-Hop en passant par l’Electro.